FFF à L’Olympia (Paris 9)

3 avril 2024.

Je ne sais pas vous, mais je n’ai jamais tellement parlé en acronymes. S’ils inondent notre vie professionnelle, je les ai un peu oubliés au quotidien depuis que les caractères ne sont plus limités dans les textos (je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans…). Pourtant, ce soir, c’est un acronyme mythique que l’on murmure devant les portes de L’Olympia, avant de le réclamer, chanter, crier au cœur de la célèbre salle du 9e arrondissement. Bien sûr, vous savez parfaitement ce que signifie « FFF », n’est-ce pas ? Mais laissez-moi vous conter d’autres mots qui se cachent entre ces lettres…

Don’t grow up, it’s a trap

Pour ouvrir cette soirée prometteuse, le groupe Joujou dévoile son univers rock, frais et gentiment insolent. Le duo frère-sœur, tout paré de cuir noir, résilles, yeux charbonneux et tatouages, joue à faire du rock comme des sales gosses. Les enfants sont tous gentils, affirment leur premier et tout nouvel EP sorti le 5 avril : Dante et Iris Jodorowsky ont soif de prouver le contraire.  Avec des titres aussi efficaces qu’Ordure, Les sirènes ou La morale, d’autres plus tracassés comme Cristobal (tous en français !), on effleure des affinités avec Therapie TAXI, Garbage ou quelques sons pop-punk des années 2000. Mais au-delà de leur insouciance scénique et leur musique jeune et enjouée, les membres de Joujou semblent surtout beaucoup s’amuser. Et ça fait du bien à regarder.

Des chiffres et des lettres

Beaucoup ont déjà fait le compte qui ne se compte pas sur les doigts :

  • 27 ans depuis leur victoire de la musique du meilleur concert dans ce même Olympia.
  • 23 ans entre leur 4e et 5e album studio : I Scream, paru le 24 novembre dernier.

(… d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître…).

Et c’est d’ailleurs avec 3 morceaux de ce nouvel album qu’FFF inaugure l’incroyable show de ce soir : tandis que l’acronyme gigantesque s’affiche sur tout un pan de mur, les musiciens débarquent sur scène, seulement éclairés par leurs lunettes néon où brillent nos lettres préférées, pour entamer All Right, suivi de Tout ce qu’on fffait et de l’excellent Magazines quasiment chanté en apnée par Marco Prince.

  • Moins d’une minute : c’est à peu près le temps qu’il faut à la salle pour chalouper follement, avant de faire carrément rebondir le plancher flottant de la salle légendaire.

Les tubes s’enchaînent (Silver Groover, On devient FFFou, Le Pire et le Meilleur, Morphée, AC2N…), comme les tenues improbables et fantasques du groupe (les cagoules complètement WTF de Niktus – acronyme, quand tu nous tiens), qui semble s’éclater à jouer autant que nous à l’accompagner.

  • Une dizaine : c’est à peu près le nombre de fois où Marco lance à la cantonade « Vous êtes toujours vivants ? », comme un rappel de leur album Live enregistré aux Eurockéennes en 1997.

OUI, on est vivants. Et eux sont carrément vivifiants ! Aussi charismatiques qu’énergiques, Marco Prince, Nicolas Baby, Yarol Poupaud et Krichou Monthieux livrent un grand spectacle intense, infatigable et dansant de plus de deux heures dans une salle pleine à craquer. Ce sont, à n’en pas douter, des bêtes de scène. Alors, prenez-en de la graine, vous « les moins de 20 ans » !

Enfin, le final qu’on attendait tous – Nico en premier : ce n’est pas « Montmartre en ce temps-là », mais géographiquement pas très loin : Barbès ouvre les rappels, la fosse chante, crie et saute ; une boule à facettes surgit. Love train : il n’en faut pas plus pour que chanteur et guitariste prennent un jouissif bain de foule.
Alors FFF, vous l’avez ? Folie Furieuse Fantastique ? Formidable Fièvre Funk ?…
En fait derrière cet acronyme, mettez tout ce que vous voulez. Tant que vous dansez !

Texte : Hélène CHAULIEU /// Croquis : Nicolas BARBERON & Olivier MARTIN

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DIONYSOS au Zénith de Paris

30 ans de carrière… ça se fête !

Un anniversaire que le groupe français Dionysos célèbre en beauté avec L’extraordinarium, un album sorti en novembre dernier, qui revisite trois décennies de tubes rock, d’histoires féériques, électriques, poétiques, fantastiques, fantaisistes, en convoquant une pléiade d’invités, histoire de donner vie, une fois encore, aux aventures de Giant Jack, Docteur Madeleine, Dame Oclès, et autres créatures TimBurtonesques…

Et quoi de mieux que du live pour souffler ses bougies, entouré de nombreux fans ?! 

Mathias Malzieu et sa bande ont donc entamé depuis le début de l’année une série de concerts, inaugurée par une première date à Nimes, le 13 février. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils s’en souviendront : à peine quelques secondes sur scène, et le chanteur fait une mauvaise chute pour finir avec une double fracture tibia/péroné : « Merci pour tous les petits mots que je reçois. Ce n’est pas grave, c’est que de la tôle froissée, comme on dit, c’est la mécanique qui s’est grippée. Le cœur est là, tout va bien. On va trouver des solutions, pas d’inquiétude, on vous tient au courant.» rassure le musicien sur les réseaux.
Et effectivement, Malzieu et son staff ont trouvé une solution… ajoutant ainsi son nom à la liste des artistes en fauteuil roulant sur scène : Dave Grohl (Foo Fighters), Axel Rose (avec AC/DC), Phil collins, Zack de la Rocha (RATM), Barney Greenway (Napalm Death), Layne Stanley (Alice in Chains), visiblement précurseur du show must go on

Nous voilà donc au Zénith de Paris, ce jeudi 4 avril 2024 pour une grosse date dans la tournée des Dionysos.

Le nouvel «Homme de Fer» (très bon matériau conducteur pour quelqu’un d’aussi électrique) en costume et casquette rouges, trône sur un siège roulant surplombé d’un majestueux Giant Jack. Ce nouvel «objet» a été conçu à la hâte, suite aux déconvenues, et se fond parfaitement dans le décor et la scénographie. Entouré des quatre autres membres du goupe, (en rouge aussi pour Babet, et costumes sombres pour Mike, Éric et Stéphan), l’énergie débordante de Mathias Malzieu nous fera vite oublier son handicap.

Passés les Ombrologies, Giant jack, Coccinelle et Don Diego 2000, les va-et-vient vont se multiplier durant la soirée pour accueillir une jolie brochette de duos : Clou (La Métamorphose de Mister chat), Troy Von Balthazar (qui assurait aussi la première partie), Emily Loizeau (Le Jour le plus froid du monde), Aldebert (Vampire de l’amour), l’écrivain Bernard Werber (Tuto pour marcher sur l’eau), le journaliste François Busnel (La Naissance de Jack), Keren Ann (Le Chêne), M (Song for Jedi), et bien d’autres… les musiciens se donnent à fond pour marquer l’événement et ravir le public.

Le show durera plus de 2h40, et malgré quelques petits problèmes techniques, (et quelques petits malins dans la salle profitant de la crédulité du groupe sur scène en inventant des «problèmes de son» ) rien n’a gâché l’ambiance rock, explosive et festive, ni l’humeur des fans, fidèles et chaleureux, prêts à chanter «joyeux anniversaire» et reprendre en choeur « Quand j’étais petit, j’étais un jedi, tellement nerveux que lorsqu’il pleuvait, souvent je m’électrocutais…»
Allez hop, un petit ver d’oreille pour le reste de la journée… et les trente prochaines années !

Texte et croquis : Nicolas BARBERON

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DÄTCHA MANDALA /// 7 WEEKS à La Maroquinerie (Paris 20)

Vendredi 29 mars 2024.

Avec une programmation excitante, éclectique et électrique, La Maroquineriela meilleure salle de Paris », selon Djubaka de France Inter. Et ce n’est pas faux…) accueillait le trio stoner originaire de Limoges, 7 Weeks, venu enflammer notre vendredi soir pluvieux, veille de week-end pascal.
Un autre trio, bordelais quant à lui, assurait la première partie… les bien nommés Dätcha Mandala.

DÄTCHA MANDALA

Avec leur son rock heavy blues sorti des entrailles des années 70, saupoudré d’influences folk et de vibrations tribales orientalisantes, le son des Dätcha est un bon mix des groupes incontournables qui nous font toujours autant rêver : Led Zeppelin, Black Sabbath, Queens on the Stone Age, AC/DC, Kiss

Les Bordelais n’en sont pas à leur premier concert… Depuis 2009, la formation s’est produite dans moult salles, européennes et mondiales, faisant entre autres la première partie des Insus (Ex-Téléphone) au Stade de France. Et ce soir, répondant à l’invitation des 7 Weeks, Nicolas, JB et Jérémy venaient présenter quelques titres de leur nouvel album, Koda, prévu le 26 avril.

Grâce à leur rock nerveux et puissant, me voici immédiatement dans le vif du sujet : je gratte nerveusement mon Posca sur les pages du carnet pour essayer de traduire graphiquement l’énergie qu’ils dégagent sur scène…

Le solo de batterie final me donne une belle occasion de faire un focus sur le musicien – les batteurs étant souvent relayés en second plan dans les pages de mes Moleskine. En l’occurrence, pas ce soir.

7 WEEKS

Je découvre depuis peu le groupe (en ayant fortement apprécié Fade Into Blurred Line, leur sixième album sorti en octobre 2023) grâce à mon pote Gilles Estines, graphiste des Seven. Et Ô grande joie ! il est là, parmi les spectateurs, débarqué de sa Bretagne, pour soutenir ses petits camarades.

Julien, le chanteur, se plante à la droite de la scène, à quelques mètres de mon enceinte préférée. Je peux aisément me concentrer sur ce grand bassiste à longue barbe et le croquer en premier plan, tandis que le trio attaque son set avec quelques morceaux efficaces de leur dernière galette.

Un week-end de trois jours, ce n’est pas les meilleures dates pour rameuter de la foule, mais le public de ce soir est juste incroyable. Selon l’ami Gilles, ancien banlieusard, « On pense que les parisiens sont blasés, mais il y avait autant d’ambiance dans la salle qu’à un concert au Ferrailleur, à Nantes, quelques mois plus tôt. »
Pris dans la frénésie générale, je crobarde au rythme de leur blues rock stoner intense.

Malheureusement, leur tour de chant est un peu court… Un petit rappel sans jouer le faux «je pars en coulisse et je reviens», et les voilà déjà en train de remballer leur matos, avant de rouler plus de 4 heures vers Limoges : « ça va, on a du pâté et des cornichons ».

Si vous avez la chance d’aller au Hellfest en juin prochain, n’hésitez pas à les retrouver sur la Mainstage 1 vendredi matin ! Et surtout, ne soyez pas en retard : ils ne peuvent jouer qu’une demi-heure !

Texte et croquis : Nicolas BARBERON

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AUGUSTA /// DELGRES à La Maroquinerie (Paris 20)

Mercredi 27 mars 2024.

C’est peu dire si nous en sommes désormais des habitués : La Maroquinerie accueillait (merci à [PIAS] et Valérie pour l’invitation !) une nouvelle fois la team Croque and Roll Live ! pour une soirée chaude comme une lutte sous les tropiques.

LA FOLK IMPRESSIONNISTE D’AUGUSTA

Une guitare à la main, Augusta, jeune chanteuse folk franco-anglaise, se présente en nous précisant qu’elle a « la particularité de jouer et chanter très doucement. »
De fait, le public reste silencieux, respectueux, le temps de son set avant de se laisser prendre à chanter le refrain de son dernier morceau.
Ses chansons d’amour habitées, parfois « tragiques » comme elle l’avoue elle-même, nous baladent dans la bande originale cotonneuse et mélancolique d’un film Sundance.
Il se dégage de l’ensemble un charme fou, auquel la personnalité et le doux flegme de l’artiste ne sont pas innocents.


Pour l’anecdote, le titre de son premier EP The beetles and the bugs (qu’on vous recommande chaudement), serait basé sur ses souvenirs d’enfance, lorsque son frère collectionnait les insectes pour lui montrer et qu’elle trouvait ça « dégueu »… Ce qui n’est pas le cas des croquis réalisés par Nicolas, qu’elle a croisé par un joli hasard dans le métro (sur la ligne 3) du retour ! 

DELGRES : VIVRE LIBRE OU MOURIR

Le temps d’une courte intro épique aux accents hollywoodiens, Delgres perce la pénombre et s’installe.
Pas de chichis, c’est parti pour 3 morceaux enchaînés à rythme soutenu avant les présentations officielles. On retrouve la chaleur de la voix, les rythmes caribéens et le charisme naturel de Pascal Danaë. Bien que sa montre pointe 4 Ed Maten, le temps se suspend sur ses puissants riffs d’où bondit le boogie. Et les autres membres ne sont pas en reste. Baptiste Brondy nous livre un moment de batterie intense sur Pourquoi ce Monde, lorsque Rafgee troque son monumental soubassophone pour une plus discrète trompette, le temps d’un solo d’une élégance folle. 

Puis le trio s’offre une parenthèse acoustique de grande classe, pour parler des migrants et ceux qui partent loin Vivre sur la route, pour prendre soin des leurs. La communion avec le public sur ce morceau est totale. 

Ils le revendiquent, la musique de Delgres (qui doit son nom à un personnage incontournable de la lutte contre l’esclavage) est celle des prolétaires, des aliénés et des opprimés du monde. Aussi leur hommage à Lennon et son mythique Working Class Hero sonne comme une évidence. On voyage de Gwada à Louisiana dans un folklore qui transpire le rock pur, engagé et enraciné. Et ce n’est pas l’incroyable rappel conclu par Mo Jodi, tube originel du groupe, qui nous fera dire le contraire.

Texte : Robin JOLLY /// Croquis : Nicolas BARBERON

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COSMIC VISION /// VOX LOW à La Maroquinerie (Paris 20)

J’aimerais vous parler de transport en commun.

Non, rassurez-vous, pas du périple en trois actes métropolitains qui nous a menés ce soir du 14 mars à La Maroquinerie, décidément l’un des QG préférés de la team Croque and Roll Live ! Pourtant, si l’on songe à l’atmosphère souterraine, sombre et métallique du métro, aux méandres ténébreux et relativement désespérés que nous promet la brochure de voyage de la RATP, notre destination s’en approche.

Qu’à cela ne tienne, même aux tréfonds du monde, Nico entrevoit toujours la lumière au bout de la ligne 3 et une source d’inspiration palpiter au cœur d’un wagon bondé d’âmes vides.

Arrivés à notre port d’escale rue Boyer, nous repartons de plus belle avec Cosmic Neman, alias Cosmic vision, qui ouvre la première partie de cette soirée. Point de train subterrien cette fois, mais une impressionnante table de mixage au centre de la scène qui, tel un radeau de la méduse interstellaire, nous emmène au bout de la Terre et au-delà, dans une galaxie très lointaine.

Notre Nostromo, par ailleurs batteur du groupe Herman Dune, moitié du duo krautrock-psychédélique Zombie-Zombie et créateur de l’émission Les Témoins du Futur, se présente seul maître à bord, maîtrisant avec virtuosité les rythmes convulsifs, vibrants et bouclés, les effets de voix alien et les sons venus de l’espace. Mais pas que ! Quand les cloches de percussion résonnent avec les notes de synthé aux allures de cithare indienne, on plane dans un autre firmament électro-méditatif.

Qu’elles soient multiculturelles ou science-fictionnelles, les forces qui gravitent dans ce Dj set font décoller un public coutumier des univers plongés dans le noir.

Et c’est dans le noir que l’on va demeurer.

Après un voyage très haut dans les cieux cosmiques, rendez-vous dans les profondeurs.

Nico les connaît bien, les quatre parisiens de Vox Low. C’est la cinquième fois qu’il les croque ; le monsieur a bon goût. Quant à moi, c’est mon baptême en live. Un baptême mécréant et sauvage, à opiner du chef dans un état second, comme damnés de catacombes.

Le set est inauguré avec Breathless Tuesday, une montée en puissance hyper rythmée et malicieuse, qui lâche son refrain et ses guitares comme des cerbères au moment où l’on ne s’y attend pas. Puis vient Distance, l’intro transcendante de leur second album Keep on falling, paru en octobre 2023 chez Born Bad Records. Chacun de ces titres invoque des pulsations de la charismatique basse de Benoît Raymond et de batterie se fightant fièrement avec les guitares et synthé, quelques sons fantômes (ces entêtants cliquetis métalliques – I am a strange machine sometimes, tiens, tiens ?) et, toujours, la voix diablement calme et caverneuse de JeanChristophe Couderc.

Le chanteur balaye son regard glacial sur la foule (la salle affiche complet !), mais ne vous y trompez pas. Car, si leur image de rockers sombres et impénétrables leur défendrait presque de sourire, c’est avec une sincérité chaleureuse que les membres du groupe saluent leurs enfants présents dans la fosse ce soir-là, ainsi que leur public qu’ils sont heureux de retrouver – confession-bière d’avant concert. Au moment de s’adresser à nous tous, les yeux ne sont plus froids mais plein de lumière.

Le plaisir plaide coupable, se partage et se propage : dès les premières notes de Ready to spend, les spectateurs reprennent le psaume occulte et la chorégraphie éthérée (hochements de tête, toujours, le pouce venant frotter éloquemment le majeur et l’index) avec fanatisme.

Le concert se déploie comme une cérémonie, alternant les notes graves, les paroles d’un romantisme broyeur de noir (Keep on falling), les mélodies envoûtantes dévoreuses d’âmes (mention spéciale à We walk, mon gros coup de cœur de ce live) et les rythmes de new wave élégante et dansante.

Et c’est là où je voulais en venir avec mon blabla-navigo du début.

C’est en observant la salle ondulante que j’ai pensé au transport en commun, cette émotion vive, cette extase mystique et collective. On y est.

À l’instar de Léonard Cohen qui écrivait « There is a crack in everything, that’s how the light gets in”, Vox Low parvient à faire rayonner les ténèbres. Transition parfaite pour rendre hommage aux lumières de La Maroquinerie qui, cette nuit, semblaient presque être musiciennes elles-aussi, ainsi qu’à la lampe magique de Nico, qui a rassemblé de nouveaux fans curieux autour de ses croquis possédés – merci !

Il paraît que Vox Low fait de la musique de caisse, de la road-burner idéale pour aligner des kilomètres ; eh bien elle se révèle encore meilleure dans les transports en commun. Écoutez, vous tirerez peut-être un peu la gueule, comme tous les autres, mais avec infiniment plus de classe.

Texte : Hélène CHAULIEU /// Croquis : Nicolas BARBERON

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MARC DUFUMIER /// THE INSPECTOR CLUZO à La Maroquinerie (Paris 20)

VENDREDI 1 MARS 2024 – CONCERT ACCOUSTIQUE

Fin février, début mars, le duo de rock farmers gascons a trusté La Maroquinerie quatre jours d’affilée. Plus fort que Chrissy Hynde – deux soirées seulement – ou que Didier “le roi” Wampas, qui avait tout de même assuré les premières parties de trois soirées mémorables ! Ce dernier jour de février, c’était donc en mode sourdine. « Shit, m’étais-je dit, j’aurais pas à aller chercher des bouchons au bar pour Nicolas et je n’pourrais m’enfiler une p’tite binouze au passage…« .

Vous savez quoi ? Pas de bol pour mézigue, la première partie aussi était acoustique ! Soucieux d’éclairer un peu nos lanternes sur un sujet qui leur est aussi cher que le rock n’roll, les deux gascons avaient invité l’un des spécialistes de l’agroécologie. Le bien nommé Marc Dufumier, agronome, ancien professeur à Agro Paris Tech, membre du comité de veille écologique de la Fondation pour la nature et l’homme (FNH) et expert auprès de la Banque mondiale et de la FAO. Lorsque le vénérable enseignant, cheveux blancs, lunettes et pull Jacquard, entre sur scène, celles et ceux qui connaissent mal The Inspector Cluzo ont dû être surpris. Alors qu’il ne s’agissait en fait que d’une énième preuve de l’engagement de Laurent Lacrouts et Mathieu Jourdain, qui se disent des « résistants, pas des activistes« .

Et nous n’avons pas regretté une seconde ce choix militant. Véritable showman, Marc Dufumier n’hésitera pas à s’amuser de son patronyme prédestiné ou de sa volonté de défendre une stratégie agricole équitable, nationale autant qu’internationale. « Vous devez vous dire que je suis plus franchouillard que Zemmour ! » rigole-t-il, déclenchant des éclats de rires en cascade. Point d’appui de ce cours accéléré d’agrologie qu’il va nous dispenser, sa propre expérience en 1966 en tant que jeune chercheur tout frais émoulu de l’Agro Paris. Envoyé à Madagascar pour porter la bonne parole d’une riziculture améliorée – et son pendant “naturel” l’insecticide – il avoue avoir pris la claque de sa vie et y avoir heureusement perdu ses certitudes de propagandiste de l’agriculture intensive. Un tournant qui lui a permis de se faire le chantre d’une démarche raisonnée autant que durable, en accord avec la nature et les enjeux à l’échelle mondiale.

Il n’a peut-être pas convaincu toutes celles et ceux présentes ce soir-là, que c’est à la société civile – chacun de nous donc – de se mobiliser, mais il est évident qu’il aura semé quelques graines d’éveil de « consciences terristes” comme le disent les Cluzo. Laurent et Romain interviennent à la fin de la prise de parole de Marc Dufumier en vantant deux de ses ouvrages disponibles au merch et demandent s’il y a des récidivistes présents dans la salle. Il y en avait Messieurs, et certains ont même crié ; « on s’ra là demain aussi !« .

Ceux qui, comme nous, remettront donc ça le lendemain, se seront donc rendus compte que la version que nous voyons ce soir et les autres soirées plus rock n’roll puisque électrifiées, auront été forcément de nature et de texture différentes. Mais ils ont eux aussi sans doute mesuré la chance de profiter pleinement de la voix exceptionnelle de Laurent Lacrouts, magnifié par le trio qui les accompagne. Le souffle caverneux du violoncelle de Lucie, les envolées du violon d’Arnaud ou celles du piano d’Arthur ont contribué à créer une ambiance intimiste tout autant que groovy.

Certes, Mathieu Jourdain ronge un peu son frein derrière ses fûts. Sans qu’on l’entende, puisqu’il n’a pas de micro, il reprend les paroles de son « Frère en idéal« . Tout comme ma voisine au sac un peu entremettant, qui les connait par coeur et me les chante à l’oreille. Des fans, dont l’âge varie entre trente et soixante piges, il y en a plein la salle qui affiche complet. Tout comme moi, toutes et tous ont dû être sensibles aux coups de chapeau donnés à leur collègue agriculteur d’Eyres-Moncube, au fidèle compagnon qui assure le merch ou à la productrice d’Armagnac qui nous régalera de ses cocktails fruités. Ils auront également apprécié l’hommage à Neil Young avec leur reprise de Hey hey my my ou à Marianne Dissard, qu’ils ont invitée à le rejoindre pour le titre The Best. Ils auront eu le rouge aux joues quand après avoir repris en chœurs des father’s days, Laurent se fend d’un « c’est beau hein… » Et d’ajouter dans la foulée son gimmick habituel ; « c’est du live, pas du tracks !« . L’authenticité, sans fards, ni chichis, c’est le credo de The Inspector Cluzo, auquel il convient d’ajouter également la simplicité et la générosité. Pour preuve, Little Girl & The Whislin’ Train la p’tite dernière pour la route qu’ils vont faire durer plus de douze minutes.

Encore une fois, on profite au maximum des stupéfiantes variations de voix de Laurent, de son visage qui se transforme au gré des émotions qu’il transcrit. J’avoue, en l’écoutant les yeux fermés, j’ai ressenti une ferveur, sinon religieuse du moins fraternelle et je ne suis pas loin de penser que je n’étais pas le seul dans ce cas ce soir-là. Merci à vous deux Laurent, Mathieu et à La Maroq’ pour ce moment.

SAMEDI 2 MARS 2024 – CONCERT ÉLECTRIQUE

Sans revenir sur la version acoustique de la veille, je ne peux m’empêcher de vous confier l’intense jubilation éprouvée ce soir-là. La relative douceur des cordes et du piano nous ont permis de véritablement apprécier la voix exceptionnelle de Laurent Lacrouts, mais nous avions été privés de sa puissance à la guitare et surtout d’une démonstration digne ce nom du talent dévastateur de son complice Mathieu Jourdain. D’où ma présence aux côtés de Maître Nicolas, pour cette dernière soirée du marathon Inspector Cluzo à la Maroq’.

On ne va pas non plus s’étendre sur la prestation en première partie. De l’aveu même de Laurent Lacrouts, l’enseignant chercheur Marc Dufumier a beau être le guest le moins easy de toute leur carrière scénique, à plus de 78 piges, il tiendrait la dragée haute à bien des showmen soi-disant pros… Le propos très accessible car passionné de ce ponte de l’agronomie, ancien élève de René Dumont est tellement essentiel et pertinent, qu’une seconde séance n’est pas forcément inutile. Public du samedi soir oblige, au bout d’une trentaine de minutes, le niveau d’écoute, et donc de réceptivité, s’étiole grandement. Il en faut plus pour décourager ce militant de l’agroécologie, qui comme la veille, ira sans faiblir jusqu’au bout de son cours rock n’roll. Il a bien raison de nous rappeler que c’est à nous tous, membres de la société civile de nous mobiliser afin que les “décideurs” comprennent qu’il est possible et surtout vital de se passer de tous les produits “en cide” qui nous empoisonnent nous et notre environnement.

Seul changement scénique notable – hormis un ampli plus balèze et un trio de Gibson à cornes trônant sur un raque – l’effigie en fond de scène de Miguel, alias Mig, la mascotte de The Inspector Cluzo. Une vraie dégaine de rocker barbichu, ce bouc de race pyrénéenne (si vous ne savez pas à quoi il ressemble, matez la pochette de l’album We The People of The soil). Pourquoi une Maroq’ quatre fois de suite alors qu’ils auraient pu remplir aisément un Olympia ? En arrivant sur scène, Laurent répond à cette question implicite. « Parce comme ça, nous sommes beaucoup plus proches et que c’est deux fois moins cher pour vous« . De la même façon qu’ils agissent en tant qu’agriculteurs de manière à prouver qu’une autre voie, plus durable et plus équitable, est véritablement possible, le duo de rockers farmers est aussi droit dans ses bottes sur scène, bien loin de la rapacité habituelle du show-business actuel. Laurent tirera d’ailleurs à boulets rouges sur les Rock en Seine et autres Printemps de Bourges ; « On s’en branle, on n’ira pas !« . Le panache de ces deux gascons !

Mathieu accroche son béret sur un des micros. Hier, il l’avait gardé vissé sur le crâne et on s’était donc passés de bouchons, mais là, on se les fourre illico dans les esgourdes ! Le gros son est bien au rendez-vous, avec en prime des »Motherfuckers » fleuris de Laurent, qui auraient sans doute un peu détonné la veille. Armé de son seul tambourin, Mathieu viendra chauffer la salle tandis que son complice se lance dans un solo funky rock du plus bel effet.

De retour derrière ses fûts pour le morceau suivant, il fera la preuve de ses capacités de moissonneur-batteur de compétition. Accents Springsteeniens (Saving the geese), réminiscences Acédéciennes (Running A Family Farm Is More Rock Than Playing Rock N Roll Music), reprises de Neil Young (Hey hey, my my) et de David Crosby (Almost cut my hair), le background du duo est reçu fort et clair par un public déchainé. Voyant que deux, trois ex-petits agités quadras s’excitent un peu trop à slamer et pogoter dans tous les sens, Laurent leur rappelle gentiment la règle ; fun okay, mais no violence.

Respect, le maître mot pour les deux Cluzo. Pour les musiciens qui les inspirent, pour Vance Powell (Jack White, Artic Monkeys) leur producteur de We The People of The soil et d’Horizon, leur dernier album. Pour Iggy Pop, à qui ils avaient envoyé un morceau se moquant de sa propension à jouer de son appendice (“Fuck you, I love my dick” leur avait répondu l’Iguane, tout en acceptant de leur faire un p’tit feat sur Rockophobia). Pour nous, leur public qui les suivons depuis 17 ans et qui ne voulons pas nous arrêter de reprendre en chœur leurs refrains. “Sont comme nous, ils n’écoutent rien” dit Laurent. Et Mathieu de surenchérir ; “On a le public qu’on mérite !”.

Un Mathieu qui nous gratifiera de son fameux et jouissif numéro de démembreur de batterie. Lors du final en mode fast and furius, tous deux finiront debout les yeux dans les yeux, l’un martelant sa guitare, l’autre maltraitant grosse caisse et caisse claire. On remerciera jamais assez la Maroq’ de nous avoir permis d’être spectateurs – et un peu acteurs – d’une telle complicité sur scène.

Texte : MAD /// Croquis : Nicolas BARBERON

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FRANÇOIS AUDOIN /// EMILIO CASTIELLO /// JOHNNY MONTREUIL à La Maroquinerie (Paris 20)

Samedi 17 février 2024.

Le plus famous des narvali du 93 qui fête la sortie de sa troisième bastos musicale à La Maroq ? Hors de question qu’on rate ça à Croque and Roll Live ! Tout comme ceusses du Treuilmon ni-chic ni-toc, qui avaient franchi le périph et qu’ont pas été déçu du voyage ! Ce 17 février, grand moment d’authenticité et de fraternité wack n’roll avec des guests en veux-tu-en-voilà ; Emilio Castiello, Didier Wampas, Nina Dalliene des Jim Murple Memorial et un François Audoin en Monsieur Loyal !

C’est donc l’homme de radio – réalisateur de Le Grand dimanche soir sur France Inter (certains chroniqueurs étaient dans la salle) et comédien – qui introduit cette soirée. Costard et noeud pap’ de crooner, François Audoin est là pour chauffer une Maroquinerie affichant complet. Les gaziers à rouflaquettes et gapettes, accompagnés de leurs gisquettes sont majoritaires et à la première allumette du François, la température de la fosse grimpe vite de quelques degrés. Dans son rôle de pseudo rocker de droite – ancien du groupe Medef Leppard -, il ne fait pas si mal le job, en pratiquant à outrance parodie et auto-dérision. Il chantera également les louanges du dividende, bien aidé par une musique sur bande (sur laquelle on reconnaît la patte de Johnny Montreuil).

C’est un vieux complice dudit Johnny qui se charge de la première partie. Emilio Castiello, qui a fait partie du gang des premières heures et avec lequel ils ont oeuvré au sein de Aälma Dili (déjà croqués). L’éminent violoniste Montreuillois nous fait la surprise de changer carrément d’instrument avec ce Solo Mandoline Show. Casquette Elvis à paillettes sur son abondante chevelure bouclée, il nous offre une version du Clan des Siciliens boostée à la mandoline, des pulsations de contrebasse et un gros beat de machine. “J’ai les miquettes” confie-t-il… Ça se voit pas vraiment sur le rock façon Casbah qui suit. Son poto fait un rapide passage à ses côtés pour lui claquer la biz et l’encourager. Et ça marche. Deux minutes plus tard, il nous balance ; “Hey, la Maroq, vous voulez du rock ?”, et d’embrayer in petto sur une rythmique fifties bien pêchue. Les deux morceaux suivants démontreront qu’à l’instar de son compère, il n’a pas son pareil pour dynamiter des mélodies façon western. Emilio aurait pu nous emmener jusqu’au bout de la nuit comme ça, mais notre Monsieur Loyal intervient en mode intermède, en adaptant notamment à sa sauce Don’t stop me now de Queen.

C’est avec Ciao Narvalo que Johnny et son gang débutent le set. Kik l’harmoniciste flingueur, plus dandy rock que jamais, Rön, sa moustache, sa gratte de surfeur, Visten, Ray-ban bien accrochées derrière ses fûts et Marceau un “petit” nouveau en doublure guitare (le jeunôt culminant facile à plus de deux mètres, à coté de lui, Johnny-la-baraque semble diminué). Mais chacun sait que ce n’est pas à la taille qu’on reconnait les mérites d’un zikos, mais bien à son jeu de jambes ou à son coup d’paluche !

Johnny Montreuil a beau jouer devant un public visiblement conquis d’avance, lui et ses aminches vont tout donner comme toujours. Kik toujours à l’unisson de Rön quand il triture ses pédales, mais c’est aussi le cas, lorsque sur 5 Minutes, ils passent tous sur le devant de la scène. L’esprit de groupe, c’est pas juste sur l’papier avec Johnny Montreuil. Pour mieux coller aux nouvelles chansons extraites de Zanzibar, il va délaisser à plusieurs reprises sa contrebasse, pour une basse ou des guitares, chanter dans un micro à effets pour Mysterious Pussy.

Son show est à l’unisson de son troisième album ; plus rock, plus varié et cela est sans doute à mettre au crédit de Jean LamootBashung, Noir Désir – présent ce soir-là et qu’il salut. Le moment à deux avec Kik, qu’il prévient amicalement “profite-en, car tu vas prendre cher” est perturbé par un sexagénaire bondissant qui reprend en braillant des “Kik, va ranger ta chambre !”. Didier Wampas himself, qui enchainera avec un Brand New Cadillac de derrière les fâgots.

Alors qu’un larsen s’est invité sur Rebel walz, Johnny nous livre une superbe version d’un des plus beaux titres de Zanzibar, le magique Goémonds. Il se mettra légèrement en retrait pour Chiner la ferraille que le public ravi reprend en chœur. Et la jolie cerise sur le gâteau, Nina Dallaine le rejoindra lors du final pour The right track – une reprise de Phyllis Dillon – et Vers les îles, originellement chanté par Rose-Marie Stanley sur l’album.

Une date à La Cigale est prévue dans l’année, ne ratez pas le Johnny sur scène !

Texte : MAD /// Croquis : Nicolas BARBERON

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NAIMA BOCK /// A. SAVAGE à La Maroquinerie (Paris 20)

Jeudi 15 février, La Maroquinerie accueillait le très classe A. Savage (Parquet Courts), venu défendre son dernier opus solo, Several Songs Of Fire, quelques mois après sa sortie. 

Retour en texte et en dessins sur cette soirée placée sous le signe de la folk…

PREMIÈRE PARTIE : NAIMA BOCK

Les plus avisés connaitront peut-être Naima Bock comme ex-membre de la formation Goat Girls, sensation post-punk londonienne de ces dernières années. 
Comme A. Savage, Naima a quitté la matrice bouillonnante de son groupe pour dévoiler, à travers le remarqué Giant Palm (opus paru en 2022 et déjà défendu sur les prestigieuses ondes de KEXP), l’univers personnel d’une véritable songwriter.

Seule sur scène, elle nous délivre ici quelques morceaux, accompagnée de sa (sublime) voix et de sa guitare (dont le mixage n’est malheureusement pas toujours très heureux), qui convoquent aussi bien la mélancolie des albums de Nick Drake que l’univers éthéré d’une Aldous Harding
Hors du temps et de l’espace, on se laisse bercer le temps d’une petite demi-heure par ces balades lancinantes, ancrées dans une certaine idée de la tradition folk, cette voix du peuple, nomade et enracinée.

Un petit plaisir éphémère dont on aurait, avouons-le, bien gouté un peu plus, mais qui a le mérite d’installer définitivement l’ambiance de la soirée à venir…

LA POÉSIE BRÛLANTE D’A. ​SAVAGE

En effet, le coleader de Parquet Courts a, lui-aussi, pris un virage de songwriter pop-folk pour sa carrière solo il y a six ans avec Thawing Dawn (2017).
Si, de son propre aveu, « chaque chanson devrait pouvoir se résumer à une guitare acoustique« , Savage livre les quelques morceaux de feu de son dernier opus accompagné d’une formation complète : batterie, basse, guitare électrique et clavier/vents. Et si la poésie folk est toujours là, elle s’habille ici d’une orchestration bienvenue, s’étirant et se déployant au gré d’incroyables moments de solos (mention spéciale à un saxo véritablement Pink Floydien), quand elle ne bascule pas dans le rock pur et expérimental façon Velvet.

Vêtu tel un dandy new-yorkais tout droit sorti d’un film de Woody Allen, Andrew impose sa voix reconnaissable entre mille tout en assumant l’héritage des plus grands folksingers, de Townes Van Zandt à Dylan, avec classe, sans chichi – et sans rappel.

Texte et photos : ROBIN JOLLY /// Croquis : NICOLAS BARBERON

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LES NUITS DE L’ALLIGATOR : THE COURETTES /// GYASI à La Maroquinerie (Paris 20)

À Croque and roll live, quand on aime, on ne compte pas et on est même adeptes de l’adage “jamais deux sans trois” ! Même si, ce 7 février, ce fut en fait la cinquième de ces nuits de l’Alligator 2024. Une soirée plus rock n’roll que les précédentes. Ce qui nous a donné envie de donner la parole à un acteur scénique essentiel, trop souvent oublié… Alors que sans lui, pas de gros son :

« Salut, moi, c’est Vince. Je suis le gros ampli, à gauche à côté de la scène de La Maroq. Des piges que j’suis là, fidèle au poste pour rendre sourdingue les accros à la fosse et envoyer la purée jusqu’au fond de la salle. De l’aut’ côté, c’est mon pote Vincent. Forcément, comme il est à droite, il est plus plan-plan, hein. Moi, j’suis à donf, j’dépote tout l’temps. Va savoir si c’est ce qui attire à chaque fois le grand barbu avec son carnet à loupiotte et le p’tit à mèche et à blouson… Font partie des habitués. Pour le second, on peut même dire qu’il fait partie des murs. Toujours est-il que comme les aut’ soirs, ces deux lascars se sont tanqués juste devant mezigue. Le grand a quand même envoyé le p’tit lui récupérer des chonbous au bar ; ses outils, c’est son coup d’crayon et ses yeux, mais il doit quand même tenir à ses oreilles en tant que croqueur de live.

Au vu du programme de cette nuit de l’Alligator, j’savais qu’on allait turbiner un peu plus et que côté show, on allait franchement se régaler, même si le vieux funky de Gypsy Mitchell m’avait bien blousé l’autre soir.

La batterie de Martin “Wild” Couri – moitié moissonneuse-batteuse danoise du duo The Courettes – était installée à un mètre. Devant de chez devant le Martin, j’étais sûr que les premiers rangs n’allaient entendre que lui et la suite me l’a prouvé. Tandis que sa partenaire, la volcanique chanteuse et guitariste Flavia Couri s’installe à sa droite, mon Martin baptise d’un jet de flotte ses fûts. C’est bien le seul moment du set durant lequel il les ménagera les pauvrets, comment ils ont pris cher ! En même temps, fallait qu’il se montre à la hauteur des riffs ultra fuzzés de sa douce Brésilienne. Enfin douce, façon d’parler. Elle envoie au chant et brandit bien haut sa guitare, avec une telle détermination que plus d’un photographe en baisse la tête.

Elle invitera les filles à la rejoindre devant la scène, mais celles-ci, un peu minoritaires, ne répondront pas à son appel. Ce qui n’empêche pas la fosse de bien tanguer, même quand Martin Courri se prend pour un lama fâché et joue au pulvérisateur humain ! J’ai vu le shooteux jamais-sans-mon-tabouret et toujours devant, s’éponger la figure plus d’une fois… Mais je n’étais pas au bout de mes surprises. V’là-t-y pas que la belle se dirige vers moi et je vous l’donne en mille, me monte recta dessus et pose son charmant fessier sur ma calebasse. Aux anges que j’étais ! Le dessineux d’en bas un peu moins. Il y avait posé son calepin, qui a eu droit sur le coup à une dédicace dont il se souviendra (fort heureusement, l’encre était sèche et n’a pas dû déteindre sur la robe toute-mimi de Flavia). J’étais remué jusqu’à mon dernier transistor, limite en court-jus, mais j’étais loin de me douter que la suite allait être tout aussi chaude et bouillante !

Je l’avais repéré Gyasi quand il était venu tester sa Gibson et son mike. Son look rock Seventies pouvait passer inaperçu dans l’quartier, pas sa crinière péroxydée. Mais quand il a fait son entrée en mode Dracula – ses trois comparses l’avaient précédé sur ma scène – tout le monde en a pris plein les yeux.

Costard à la Ziggy Stardust, façon moule-à-facettes, boots plate-forme vermillon, yeux de biche à rimmel, plus glam, tu pouvais aller te rhabiller ! Et pourtant, fallait pas se fier aux apparences ; le son de Gyasi et de ses zikos ne se limite pas à du Marc Bolan revisité façon XIXe siècle. Plus que bien épaulé par sa guitariste, il a appelé à sa rescousse les mannes du blues rock seventies à la Led Zep, allant même jusqu’à jouer de l’archet comme le père Jimmy.

Et surtout, il peut remercier Bowie d’avoir testé avant lui les postures théâtraaaales. Bon, avec son Snake city au parfum Jeangeniesque, on n’peut pas dire qu’il cache ses influences… Je vous disais plus haut que j’allais pas être au bout de mes surprises ce soir-là. Déjà, le dessineux n’avait pas arrêté de mater autour de moi l’air inquiet (j’ai compris plus tard qu’il craignait qu’on lui ait gaulé son manteau qu’il avait posé sur moi, l’inconscient…). Idem, en plein morceau, un gars bien chaud avec sa binouze monte à coté de moi et se met à taquiner de l’harmo. Z’ont été très classes les ricains ; la guitariste lui a filé son mike et il a pu jammer avec eux. L’a eu son quart d’heure à la Warhol le garçon. Vous allez pas me croire, un peu plus tard, ce p’tit copieur de Gyasi me l’a fait à l’envers en me grimpant dessus lui aussi ! J’avais plus un transistor de sec, j’suis pas de bois non plus. Il a laissé deux plumes de son boa sur moi, j’espère que l’équipe de ménage ne les verra pas, je les garderais bien en souvenir de ma gator’s night la plus hot ! »

Texte : MAD /// Croquis : Nicolas BARBERON /// Photo : David POULAIN

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LES NUITS DE L’ALLIGATOR : MUDDY GURDY /// GYPSY MITCHELL à La Maroquinerie (Paris 20)

Mercredi 30 janvier 2024.

Premier rendez-vous hexagonal pour les mordus du blues et du rock vintage depuis dix-huit hivers, le nocturne alligator est connu pour attirer dans l’eau profonde de ses bayous plus d’un curieux. Curieux, c’est le second schtroumpf des Croque and Roll girls and boys. Et pour cette quatrième nuit 2024 à La Maroquinerie, on a été schroumpfement surpris par les Auvergnats de Muddy Gurdy et le pétaradant septuagénaire funky-bluesy Gypsy Mitchell. 

Okay, ce n’est pas leur premier Gator, loin de là. Mais ça a dû leur boucher un coin à Nicolas et Olivier, les Starsky et Hutch serial croqueurs de se faire un concert… de vielle ! La belle et talentueuse guitariste Tia Gouttebel a beau être la lead vocal de Muddy Gurdy, tout comme eux, plus d’un spectateur littéralement éberlué, a dû mater sans discontinuer Gilles Chabenat et son instrument. Ça sonne comme une guitare, ça marque le tempo comme une basse, ça flirte même avec le vibrato d’un violoncelle.

Muddy pour le grand boueux Mississippi, Gurdy pour Huddy Gurdy, traduction de vielle à roue. Grâce à cette vieille machine de prime abord incongrue, le trio rend hommage aux musiques rurales ancestrales, mariant centre de la France et delta du Nil d’Amérique. Tia, Gilles et Fabrice Bony, à la batterie depuis septembre dernier, tirent leur chapeau à leurs inspirateurs, B.B King – Help the poor co-écrit avec Eric Clapton, R.L Burnside avec le standard Skinny man, féminisée pour l’occasion ou le soulman Sam Cook, dont ils livrent une version “plus rurale” de son Chain Gang. Un autre hommage tout aussi respectueux ponctuera leur set ; à Marc Glomeau batteur et fondateur du groupe avec sa compagne. MG’s Boogie rappellera comment lui et Gilles Chabenat sont parvenus à discerner les points communs entre bourrée auvergnate et blues américain. La musique de Muddy Gurdy, qu’ils mettent un point d’honneur à enregistrer dans des lieux chargés de sens – un cratère de volcan, un bar Louisianais ou un bateau dans un bayou – abolit les distances physiques autant que culturelles. Elle parle au coeur et à l’âme.

Le Texan qui les suit sur la scène de la Maroquinerie a lui aussi de l’authenticité à revendre. Charles Ray “Gypsy » Mitchell a 50 piges derrière lui en tant que guitariste et arrangeur pour The Relatives. En 2022, il décide de passer sur le devant de la scène pour porter la bonne parole de son gospel funk psyché, allant même jusqu’à enregistrer un album.

Il reste quelque chose de ce passé de musicos car il teste lui-même son micro et son vocodeur avant de jouer. Et déjà, un lien complice s’installe avec le public. Plus showman que le Gypsy, tu meurs. Alors que son gang balance un son soul de derrière les fagots, que la choriste nous chauffe à grands coups de Rock me baby, il fait son entrée affublé d’un manteau peau-de-lapin digne d’un mac des films de Blackexploitation. Foulard sur la tête et lunettes funky, une patate et une silhouette de jeune homme, Gypsy Mitchell est une véritable machine à groover non-stop. Il laisse volontiers la place aux cadors de son backing band, le guitariste notamment. À la surprise générale, il s’autorisera même – un exploit à son âge – à descendre dans la fosse et à y jouer guitare dans le dos. Enchaînant des titres funky autant que bluesy qu’ils font durer pour le plus grand plaisir du public, lui et ses musicos termineront le set avec Knockin’ On Heaven’s Door de Dylan, une reprise inattendue, bien dans l’esprit foutraque et jouissif du personnage !

Texte : MAD /// Croquis : Olivier MARTIN & Nicolas BARBERON

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